Bernoulli, Johann I an Maupertuis, Pierre Louis Moreau de (1731.11.13)

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Kurzinformationen zum Brief       mehr ...
Autor Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Empfänger Maupertuis, Pierre Louis Moreau de, 1698-1759
Ort Basel
Datum 1731.11.13
Briefwechsel Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 662, Nr.14
Fussnote Am Briefkopf eigenhändig "à Mr. de Maupertuis". Brief paginiert



File icon.gif Monsieur

J'espére que cette reponse à Votre derniere dattée de S.t Malo du 23.e 8.bre Vous trouvera de retour à Paris en bonne santé. Je suis bien aise que ce que je Vous ai communiqué au sujet de la pretendue experience de Mr. Graham contre les forces vives Vous ait satisfait; c'est en vain de congratuler celui de mes fils qui en a fait la copie,[1] car il n'a pas plus de connoissance de ce qu'il a ecrit, qu'un perroquet de ce qu'il parle; mon fils l'ecrivain destiné au Negoce ne s'est jamais appliqué aux Mathematiques, il n'entend qu'un peu d'arithmetique, autant qu'il en faut à un Marchand. Il est vrai qu'on est indigné de voir toujours rebattre la consideration du tems, aprés avoir defini tant de fois ce qu'on entend par forces vives: Nos Adversaires semblent imiter les Criminels, dont quoique convaincus on ne peut arracher la confession de la verité que par la torture, je crois que si on les mettoit à la question pour leur faire declarer l'interieur de leur conscience, ils chanteroient bientot sur un autre ton, car je suis entierement persuadé que la plupart d'entr'eux ne soutiennent l'erreur commune que par opiniatreté, se faisant une honte d'avouer qu'ils s'etoient trompés; Les Anglois contraires à notre Théorie, ajoutent encore la mauvaise foi à leur opiniatreté par une haine generale contre les Etrangers File icon.gif particulierement contre Mr. Leibnitz et moi, se faisant un devoir de rejetter et de mépriser tout ce qui vient originairement de nous, soit bon soit mauvais, voyés s'il y a moyen de les reduire à un aveu sincere. Est ce par raillerie Monsieur, ou comment l'entendés Vous, quand Vous me donnés ces louanges flatteuses sur ma pretendue capacité de pouvoir ecrire en Votre langue aussi bien que les françois qui ecrivent le mieux? permettés moi que je prenne cela comme un honnete refus, par lequel Vous ne voulés pas Vous meler dans notre querelle de peur peutetre de déplaire à Vos constitutionnaires quoique la Bulle unigenitus n'ait point condamné l'article des forces vives: ce petit trait peut bien etre pardonnable, c'est sans malice que je l'ai avancé, croyant que Votre compliment outré le meritoit. Au reste Monsieur Vous me ferés grand plaisir de me communiquer Vos reflexions sur le memoire de Mr. de Louville, quand Vous l'aurés lû: je suis seur que ce memoire sera sifflé de touts les gens bien sensés, de ceux meme qui n'ont pas encore adopté les forces vives, tant il est rempli de pensées bizarres et affectées, inventées uniquement pour contredire; on croiroit File icon.gif qu'il a voulu montrer ce qu'un Esprit imaginatif et chicaneur peut produire contre une verité la mieux prouvée, cependant il parle d'un air serieux et en Maitre, comme s'il avoit la raison de son coté ou pour mieux dire, comme s'il enonçoit des oracles ex tripode.

Vous devés Vous souvenir qu'il y a longtems que je me suis plaint à Vous de la miserable objection de Mr. Maclaurin contre les forces vives tirée des corps jetté de la barque ou du rivage, ne Vous ai-je pas dit, ce que j'ai aussi ecrit à Mr. de Mairan, que par un argument semblable à celui de Mr. Maclaurin, on prouveroit qu'il est faux que les aires des cercles sont comme les quarrés de leur diametre? ce n'est donc que dès aujourdhuy que Vous avés leu la piece de Mr. Maclaurin, et que par Votre propre lecture Vous y avés remarqué le ridicule de son objection; Cependant non obstant tout le ridicule de cette piece, Mr. de Mairan en avoit parlé comme d'un chef d'oeuvre qui detruisoit les forces vives de fond en comble, il n'en falloit pas d'avantage pour couronner cette piece, c'est à dire, pour recompenser le plus grossier des paralogismes en dépit de la verité qui doit succomber, quelle honte pour tout le corps de Votre illustre Academie! l'erreur triomphe, la verité terrassée gemit, quelle indignité! quelle injustice!

File icon.gif Il est tres certain Monsieur qu'on se perd et qu'on se fatigue en lisant ce qu'on a donné sur la matiere des forces vives dans le 1. Volume de l'academie de Petersbourg:[2] Tout y est extremement confus, le bon melé avec le mauvais tellement qu'on ne peut discerner l'un d'avec l'autre; je ne sai si ces Messieurs en soutenant la bonne cause ne lui font pas plus de tord que de bien, en un mot il paroit qu'eux memes n'ont pas encore l'idée distincte de ce qu'ils veulent defendre et qu'ils ne sont pas parvenu à l'interieur qui fait l'essence des forces vives; asseurement ces Messieurs gatent la bonne cause au lieu de l'affermir il vaudroit bien mieux qu'ils s'en fussent abstenus tout a fait. Les raisonnements de Mr. Bulfinguer ne sont pas toujours solides et donnent souvent à gauche, il confond meme quelque fois la force vive avec la morte et ce qu'il dit amplement sur la composition des forces obliques est pour la plupart un galimatias obscur.[3] Le jargon metaphysique de Mr. Wolfius fait à la façon de Mr. Leibnitz ne prouve pas grand chose: vous remarqués fort bien que son art. 69 est un paralogisme tout pur;[4] mon fils l'avoit deja remarqué lorsqu'on en fit la lecture dans l'assemblée de l'academie à Petersbourg, il l'en a averti par une lettre, afin File icon.gif qu'il corrigeat son erreur avant que son Memoire fut imprimé, mais mon fils m'a écrit, que Mr. Wolfius ayant tres mal receu cet avertissement, lui repondit assés fierement qu'il n'avoit pas besoin de ses avis, c'est ainsi qu'on a laissé ce paralogisme dans l'impression. On devoit attandre sur cette matiere quelque chose de plus solide de la part de Mr. Herman, mais, entre nous dit, hormis quelques bonnes choses qui se trouvent dans sa dissertation longue et ennuyante, il y en a quantité qui sont de peu de validité pour defendre la bonne cause;[5] j'y ai meme remarqué un vilain paralogisme, je ne sai si vous ne l'avés pas aussi remarqué; il est dans le raisonnement qu'il fait pag. 39 jusqu'à la fin de sa piece, où pour repondre à l' objection de Mr. Clarck, qu'il apelle son Achille, prise d'une experience faite avec deux pendules et qui se choquent avec des vitesses reciproques à leurs masses, et ensuitte avec le meme pendule et un autre plus petit que qui se choquent aussi avec des vitesses reciproques à leurs masses, supposant que ait la meme vitesse dans chaque cas, Mr. Herman aprés avoir prouvé que le commun centre de gravité de et monte plus haut que le commun Centre de gravité de et , File icon.gif de là il conclud que la force vive du corps est plus grande que la force vive du corps ; mais cette conclusion est vicieuse, car si le Centre de gravité de monte plus haut que le centre de gravité de , par recompense la somme des masses est plus petite que la somme des masses ; ainsi Mr. Clarck s'il vivoit encore, ou ses adherans, diroient qu'il ne l'en suit pas que la force vive de la moindre somme des masses est plus grande que celle de la plus grande . Je Vous prie de relire cet endroit pour voir si je n'ai pas raison de le taxer de paralogisme. Il est tres vrai que la force vive ne se mesure que par le nombre d'effets homogenes qu'elle peut produire en se consumant totalement; comme par ex. en bandant un certain nombre de ressorts egaux aux degré egal de compression, ou en rompant un certain nombre de filets ega[ux].

J'ai demandé à notre Gazetier, qui demeure dans mon voisinage par où il a appris que feu Mr. de Maisons ait composé 2 Volumes en 4.to il m'a repondu que c'etoit d'un manuscrit de Paris qu'il l'avoit tiré; quoiqu'il en soit, c'est une grande perte que l'on a faitte par la mort prematurée de Mr. de Maison: on est icy surpris de ce qu'en France, et surtout à Paris les gens passés l'age de 20 ans meurent ordinairement de la petite verole, File icon.gif et ce qui plus est les gens de quallité plutot que ceux du commun; n'est ce pas peutetre le trop de soin et les trop frequentes saignées, qu'on employe ches Vous jusqu'à la fureur, qui causent tant de ravages funestres: Ici où on laisse operér la nature secourue de peu de medicaments on voit rarement, que cette maladie enleve les gens de quelque age qu'ils soyent; L'inoculation devenue à la mode en Angleterre, dont on s'y trouve bien, n'est pas encore receue en France, c'est pourquoi il vaut mieux de mourir en forme que de guerir contre la regle comme dit Moliere.[6]

Non, Monsieur, je ne me suis jamais appliqué à la solution du probleme des Cometes; ce que dit Mr. Newton de l'extreme difficulté de ce probleme, joint à la longueur et obscurité impenetrable de la solution qu'il en donne[7] font que je ne veux pas hazarder de perdre inutilement mon tems. Il me semble pourtant que la chose seroit faisable pour le cas, où le mouvement de la comète se fait dans le plan de l'ecliptique, supposant encore que la distance de la Commete au soleil, à chaque observation, soit connue soit par calcul soit par observation, sans cela je serois de l' avis de Mr. Cassini, que trois observations ne suffisent pas pour rendre le probleme determiné. Cependant je ne decide rien me reservant d'y penser quand j'aurai la tete plus libre de distractions: mais cela quand arriverat-il? peutetre File icon.gif à la semaine de 3 jeudis, le repos et la tranquilité d'esprit si necessaires aux meditations mathematiques paroissent etre bannis pour jamais de chés moi, c'est à quoi mes frequents contretemps contribuent beaucoup. Neantmoins les petits intervalles de liberté que me permettent ces facheuses distractions m'ont mis en etat de reflechir sur Votre maniere tres ingenieuse de construire certaines equations diff[erentielles] du 2 degré sans passer par les premieres differentielles; voici donc mon sentiment là dessus, puisque vous le souhaités: Les équations dont vous parlés sont celles qui sont comprises sous la forme , où et representent des fonctions quelconques donnée[s] d'une indeterminée, et une quantité quelconque. Pour cela Vous decrivés la courbe dont l'ordonnée etant , l'abscisse ; Et Vous prenés l'amplitude de cette courbe pour quelque quantité constante. C'est ainsi que moyenant l'angle qui mesure l'amplitude et qui se determine en tirant les deux tangentes aux extremités de chaque arc de la courbe, Vous construisés sans peine l'equation . En effet cette maniere de construire est tres belle, à cause de sa simplicité, mais c'est dommage qu'elle ne s'etende qu'aux cas qui supposent l'element de la courbe, dont les coordonnées sont et , constant c. à. d. File icon.gif constant; ce qui fait que l'equation n'est differentielle du 2.d degré qu'en apparence, pouvant toujours etre reduite à une equation differentielle du premier degré, à cause de la dependance mutuelle entre et , qui donne toujours la valleur de en ; en voicy la demonstration: Puisque et sont deux fonctions d'une meme indeterminée, que je nomme , on aura et , où et seront pareillement deux fonctions données de ; donc , c'est à dire doit etre fait = à une constante, donc sera , d'où on tire , mais à cause de , on a (en substituant la valeur de ) ; Or et etant aussi des fonctions données de il viendra et ; donc en substituant ces valleurs de et , Vous trouverés enfin ; ainsi votre equation se convertit en celleci (mettant pour sa valeur ) , divisé par Vous aurés enfin , équation differentielle du premier degré et meme sans melange d'indeterminées, par consequent construisible par quadratures, parceque , , , sont des fonctions données de , ce qu'il falloit prouver. À la premiere lecture de Votre decouverte, je croyois en pouvoir tirer usage pour la File icon.gif solution de la formule de Mr. Euler , qui j'ai transformée autrefois si Vous Vous en souvenés en equation differentielle du premier degré, mais d'une maniere penible et qui donnoit à la verité une telle équation, mais sans separation d'indeterminées; je voulus donc chercher mon cahier consistant, si je m'en souviens, en 4 ou 6 feuilles, pour en faire la confrontation avec Votre formule, mais je n'ai peu retrouver ce cayer: Je sai que Vous en avés pris copie, ainsi Vous me ferés plaisir d'en faire faire une seconde copie et de me l'envoyer; elle me pourra etre utile dans la recherche, qui m'a occupé depuis quelque tems, d'une nouvelle Theorie de la propagation du son. Celle de Mr. Newton tres obscure pour moi ne me contentant nullement et m'etant meme suspecte de paralogisme, outre que personne autre autant que je sache, ait donné une methode seure et infaillible pour determiner la vitesse du son; voici ce que j'ai trouvé là dessus: Soit la longueur donnée d'un pendule, à la circonference du cercle, le diametre etant ; soit aussi la raison de la pesanteur specifique du vif argent à celle de l'air qui nous environne multiplieé par la hauteur du vif argent dans le Barometre que Mr. Newton suppose de 30 pouces, je dis que donnera la distance que parcourt le son dans le tems d'une oscillation du pendule ; voilà une expression File icon.gif bien simple. Si Vous l'appliqués aux suppositions de Mr. Newton (v. pag. 343 Princ. Edit. 2) où il pose un pendule à secondes pouces, pieds pouces[8] item , Vous trouverés pouces, ce qui donne pouces pieds, precisément conforme à ce qu'a trouvé Mr. Newton, quoique je ne sache pas si ce n'est pas un cas fortuit que le raisonnement de Mr. Newton qui me paroit suspect, donne une solution conforme à la mienne. Quant au reste j'ai remarqué une harmonie admirable entre les vibrations des cordes de musique et les ondulations de la matiere sonorifique.

Si Vous ne pouvés pas faire le voyage de Bale avec Mr. Deuchert servés Vous d'une autre occasion, Vous me serés toujours le bien venu, en tel tems que vous veniés, acceptés mon offre sans façon. Je suis ravi d'apprandre Monsieur qu'on Vous ait nommé Commissaire pour l'examen des pieces, j'espere que les prix seront distribués plus conformement à leurs merites, qu'on n'a fait par le passé; je reprendrai peutetre courage à travailler sur quelque sujet de ma convenance, quand je Vous verrai du nombre de mes juges, Vous dis-je qui avés autant de droiture que de capacité pour juger dignement de la validité d'une piece. Il faut finir, l'espace me manque et il ne m'en reste que pour Vous asseurer de l'attachement perpetuel avec lequel j'ai l'honneur d'etre Monsieur Votre etc.

Bâle ce 13. 9bre 1731.


Fussnoten

  1. Jacob oder Emanuel Bernoulli?
  2. [Text folgt]
  3. [Text folgt]
  4. [Text folgt]
  5. [Text folgt]
  6. [Text folgt]
  7. [Text folgt]
  8. [Text folgt]


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