Bernoulli, Johann I an Maupertuis, Pierre Louis Moreau de (1735.10.13)

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Kurzinformationen zum Brief       mehr ...
Autor Bernoulli, Johann I, 1667-1748
Empfänger Maupertuis, Pierre Louis Moreau de, 1698-1759
Ort Basel
Datum 1735.10.13
Briefwechsel Bernoulli, Johann I (1667-1748)
Signatur Basel UB, Handschriften. SIGN: L Ia 662, Nr.36
Fussnote Am Briefkopf eigenhändig "à Mr. de Maupertuis". Eigenhändiger Zusatz



File icon.gif Monsieur

Si la durée de notre silence vous a autant enuié que moi jusqu'à vous paroitre d'un siecle, vous en etes la cause, car il ne tenoit qu'à vous à le rompre en me faisant une réponse que vous me deviés sur ma derniere lettre du 8.e Mai;[1] Mais je vous en fais grace, vû les distractions où je vous vois presentement. Je connois trop bien votre exactitude pour ne pas etre asseuré que le retard des contracts de la Tontine ne doit nullement vous etre attribué; ainsi soiés en repos sur ce chapitre, comme nous le sommes, etans bien certains que dans ce delai il n'y a rien de perdu. Vous avés raison Monsieur, que la bienveuillance de Monsieur Donsembrai envers moi n'est point alterée depuis votre brouillerie avec lui; Il vient de m'en donner une eclatante preuve par l'envoi de plusieurs gros paquets, contenants les Mem. de 1732 et deux douzaines de nos pieces que j'ai partagées avec mon fils: encore les a-t-il accompagnées d'une lettre fort gracieuse et remplie de politesses; à la quelle nous repondimes en termes soumis du mieux que nous l'entendions.

J'ai apris avec quelque etonement le voyage du Nord, auquel vous dites etre destiné avec Monsieur Clairaut, pour y faire des File icon.gif observations tant sur le pendule que sur la grandeur des degrés de latitude: Pour avouer la verité je ne vous croiois pas assés routiné en fait de pratique pour les observations; vous et moi nous sommes plus fait pour le cabinet à y vaquer aux meditations: cependant votre adresse naturelle et un peu d'exercice que vous allés vous donner chez M.r Cassini vous mettra en peu de temps au fait de la pratique pour devenir observateur adroit et habile. Mais quant à M.r Clairaut je n'ai pas si bonne esperance qu'il puisse bien reussir dans l'art de faire des observations, à cause de sa myopie ou vüe courte, qui n'est point du tout propre pour cet exercice. Combien de temps vous faudra-t-il pour faire ce voyage et pour revenir? quand est ce que vous l'entamerés et aurés vous encor d'autres compagnons ou irés vous tout seuls vous deux? Ce pais là où vous allés est ouvert pour tout le monde, aux heretiques, comme aux orthodoxes, ainsi vous n'aurés rien à craindre sur ce point, et vous pourrés hardiment recevoir dans votre compagnie telles gens que vous jugerés, vous etre convenables mais quand vous serés sur la Mer Baltique prenés garde des Capres Russiens et soyés munis de bons passeports. Je vous souhaite un heureux voyage et que le Bon Dieu soit votre guide.

File icon.gif Je souhaiterois de tout mon coeur d'etre en état de vous donner mon conseil et quelques bons avis sur ce que vous aurés à faire pour vous acquiter parfaitement de la commission dont vous etes chargé, mais vous savés M.r que j'en aurois bien besoin moi meme si je devois faire ce voyage pour un tel dessein; je n'ai jamais eu l'occasion de m'exercer dans le metier de faire des observations astronomiques et quand je l'aurois eüe je ne sçai si j'aurois pu faire de grands progrés à cause de la foiblesse de mes yeux qui m'a incommodé dés mon bas age; Il me vient pourtant dans l'esprit une reflection que je dois vous communiquer: Vous dites que les distances sur le terrain se mesurent assés seurement, cela est vrai, car cela ce peut faire ou par la Mesure actuelle si les distances ne sont pas trop grandes, ou trigonometriquement par le moien d'une chaine de triangles, comme cela s'est pratiqué en France lorsqu'on avoit etabli la Meridienne de Paris continuée d'un bout à l'autre du Royaume, mais je conçois tres bien ce que vous ajoutés que l'operation delicate c'est celle de la difference en latitude ou la difference de distances d'une même etoile au Zenit, aux deux extremités de la distance mesurée sur Terre, je conçois dis je que la moindre erreur glissée dans les observations peut causer un effet sensible dans la difference de latitude que l'on cherche entre les deux stations choisies, or une telle erreur peut provenir ou de la part des instruments, ou de quelque inexactitude des observateurs File icon.gif et cela dautant plus qu'il est difficile d'attraper le veritable moment du passage de l'etoile par le meridien ou par quelque autre verticale donné; J'ai donc pensé qu'on pourroit remedier en quelque façon à cet inconvenient, si on pouvoit avoir quelque part un point visible et immobile, si non dans le Ciel, au moins d'une elevation fort haute au dessus de la Terre, mais où trouverat-on un tel point, puisque les sommets des plus hautes Montagnes, comme celui du Pic, n'ont guerre de hauteur perpendiculaire plus grande que d'une lieuë ce qui est trop peu sensible par raport au demi diametre de la Terre: Il me semble qu'on pourroit se servir a ce dessein (je hazarde cette idée mais à condition que vous ne vous en mocquiés pas) des Aurores Boreales qui sont fort frequentes dans les pais septentrionaux où vous allés; Il y en a qui doivent etre fort hautes temoin celle de 1726 qui fut vue dans pres que toute l'Europe et dont la hauteur reelle suivant le calcul de M.r de Mairan surpassa la distance de 250 lieues. Voici presentement mes reflexions; La Lumiere boreale est ordinairement composée de plusieurs bandes circulaires, qui selon l'hypothese de M.r Meyer, que vous adoptés aussi avec M.r de Mairan, sont parallelles à l'equateur de la terre et ont leur centre dans l'axe de la Terre; Donc les arcs de ces bandes au dessus de l'horizon ont toujours leurs sommets dans le Meridien du spectateur, en sorte que differents spectateurs sur un meme parallelle de la terre, verront le sommet d'une même bande File icon.gif egalement haute, et que s'ils se trouvent sous differents meridiens et en differents paralleles, les differences des hauteurs apparentes du sommet d'une bande seront les mêmes que si les spectateurs se trouvoient sous un même Meridien et ces differences seront toujours egales aux differences des Latitudes des stations des spectateurs, plus les Angles de parallaxe, tout cela est facile à imaginer; Pour en tirer usage et pour m'epargner la peine de tracer une figure je me servirai d'une figure du Livre de M.r de Mairan[2] qui est la 7.e sur la planche 4.e est une portion d'un Meridien de la Terre (consideré si vous voulés comme elliptique), et sont les deux stations de deux observateurs, qui sont convenus entr'eux de prendre les hauteurs aparentes du sommet de celle de ces bandes qui leur paroitra avoir le bord (soit exterieur ou interieur) le mieux marqué et terminé; Voilà donc un point visible qui demeure immobile pendant tout le tems que la lumiere boerale continue d'etre bien marquée; Ainsi tirant et tangeantes aux points et on aura les angles d'observations et qui donnent les hauteurs apparentes du point : tirant aussi les deux normales , à l'arc dont le concours seroit le centre de la terre si etoit un cercle parfait; mais quelle qu'en soit la courbure, il est toujours sensible, que l'Angle marque la difference de latitude des deux stations , ; Or pour determiner cet angle , je fais cette deduction (ajoutant à chacun un angle droit) , donc . Reste à trouver l'angle de paralaxe , ce qui se File icon.gif fait par la trigonometrie ordinaire, car considerant la corde comme se confondant avec son arc que je supose n'être que de 2 ou 3 degrés, on aura le triangle rectiligne dont on connoit la base par la mesure actuelle en toises, item l'angle qui passe pour egal à l'angle et enfin l'angle qui passe aussi pour le complement à deux droits de l'angle : de cette maniere la paralaxe etant trouvée on aura c'est à dire que ou le nombre de degrés contenu dans la difference de latitude est egale à la difference des hauteurs apparentes Moins la parallaxe.

Le Golfe de Botnie que l'on a choisi pour le lieu de vos observations me paroit trés bien choisi par plusieurs raisons, car 1.o Ce golfe est assés septentrional et d'une etendue considerable du sud au Nord d'environ 6 degrés depuis son embouchure où est l'isle d'Aland sous la Latitude de 60 degrés jusqu'à l'extremité septentrionale où est la Ville de Torno à 66 degrés de latitude. 2.o Sa longueur suit presque par tout la direction du Meridien qui passe par Aland. 3.o La partie meridionale du golfe à son bord occidentale situé quasi parfaitement le long d'un même Meridien entre deux villes ou Bourgs nommés Gelfe et Nova distans entr'eux[3], d'environ degrés ce qui fait une longueur de plus de 60 lieues de France. 4.o Comme il n'y a point de marée sensible dans la Baltique, on peut etre asseuré que dans un temps calme ses eaux sont par tout dans leur niveau naturel: Or il est File icon.gif important que les observations celestes sur tout celles que l'on voudroit faire sur les aurores boreales se fassent à fleur d'eau de la mer calme ou en des endroits egalement elevés au dessus de la surface; On pouroit donc prendre les deux stations aux environs de Gelfe et de Nova et en mesurer actuellement et avec beaucoup de soin la plus courte distance en toises, dont le nombre comparé avec les degrés, minutes et secondes que l'on aura trouvés par les observations pour la difference de latitude de ces deux villes determinera combien il faut de toises pour la longueur d'un degré du meridien à la hauteur du Pole de 61° à 64°. Le reste depend de la justesse des instruments et de l'habilité des observateurs. Il faudroit connoitre la situation et la nature du terrain pour mieux conseiller, et sçavoir si ces pays là sont unis ou montagneux; Peut etre que la cote orientale du Golfe est plus commode pour faire vos operations; vous y trouverés aussi deux villes Maritimes sçavoir Abo et vieux Carleby, dont la difference de latitude doit etre de degrés par consequent environ 87 lieuës de France dont l'une est eloignée de l'autre; Pourvû que les endroits d'entre d'eux soient accessibles, pour prendre commodement la mesure de l'un et de l'autre trigonometriquement je prefererois de choisir les deux stations indiquées ici à celle du coté occidental du golfe, d'autant plus que du coté oriental il n'y a pas beaucoup de rivieres, qui se dechargent dans le golfe et qui rendroit l'operation plus dificile; J'en juge ainsi par la carte d'Europe de feu M.r de L'Isle gravée l'an 1724, qui me paroit assés exacte.[4]

Voilà Monsieur bien au long mes pensées sur cette affaire, vous dirés peut etre que j'en parle comme l'aveugle des Couleurs; j'en tombe d'acord File icon.gif mais vous me les avés extorquées. Souvenés vous en voyageant de faire aussi des observations sur l'inclinaison et declinaison de l'aiguille aimantée, sur la grandeur de la refraction horizontale des astres, sur les hauteur[s] moyennes du Barometre à la surface de la Mer, sur la pesanteur de ses eaux et sur d'autres curiosités qui doivent se trouver differentes dans les pays du Nord de celle de nos climats temperés.

Vous me marqués que M.r Clairaut à qui je fais mes compliment[s] est du nombre de[s] M.rs les Commissaires pour le prix de l'année prochaine, si cela est il faut que vous differiés votre voyage jusques aprés Paques. Il est vrai que j'ai envoié une piece à M.r De Fontenelle[5] mais si elle reussit elle portera le nom de mon fils Jean afin que son nom et sa personne devienne aussi connu dans le monde. Je ne doute pas que vous n'ayés ocasion de lire cette piece au quel cas vous me ferés plaisir de m'en dire votre sentiment ce que vous oserés bien faire, puisque vous n'etes[6] pas commissaire et que cela ne prejudiciera en rien à personne d'autant que j'en garderai le secret. L'auteur de la piece a emploié toute l'application en la composant et il se flatte qu'on y trouvera des singularités bien demontrées, qui distingueront sa methode d'expliquer la propagation de la lumiere de celles dont d'autres se sont servis jusqu'à present. Je suis avec un devouement parfait Monsieur Votre tres humble et tres obeisant serviteur Bernoulli

Basle ce 13 8bre 1735

Selon que vous me mandés je croi que cette lettre vous trouvera chés M.r Cassini à qui je vous prie de faire mes tres humbles obeissances en lui demandant pourquoi à son retour du voyage de Landau (qu'il fit l'année passée pour mesurer les degrés paralleles de Paris) il n'a pas voulu nous honorer de sa presence comme on m'avoit fait l'esperance j'en aurois eu un extreme plaisir.


Fussnoten

  1. [Text folgt]
  2. [Text folgt]
  3. Im Manuskript steht "entr'euux".
  4. [Text folgt]
  5. [Text folgt]
  6. Im Manuskript steht "éstes"


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